ignatus
l'interviou exclusive !!

On peut carrément parler ici d'interview épique... Pour notre troisième expédition dans Paris, (Xème arrondissement cette fois) on avait quasiment rien oublié. Rien, excepté le numéro de l'immeuble d'ignatus dans sa rue, ce qui nous a obligé à essayer le code de l'immeuble sur à peu près toutes les portes à code de la rue dans l'espoir d'arriver à en ouvrir une... Finalement il a fallu téléphoner aux parents pour qu'ils aillent retrouver l'adresse d'ignatus dans l'CD, redescendre toute la rue (évidemment on était partis à l'opposé) pour arriver devant le bon immeuble dont la porte était... ouverte. Finalement le code nous aura été d'une utilité douteuse... On était trois c'coup-ci : Christophe, Malo et moi. Vala c'que ça a donné :

Tu peux nous parler un peu d’toi ?
Oui… C’est long, ma vie est déjà bien longue et… quoi dire ? J’ai passé mon enfance en banlieue, en Seine St Denis, où j’me suis foutu devant un piano à l’âge de 9, 10 ans, et j’ai eu une chance folle c’est que j’étais amoureux de ma prof de piano, donc j’ai beaucoup fait de piano.

Elle avait quel âge ta prof de piano ?
C’était ma cheftaine, elle devait avoir 25, 30 ans, elle était jeune et tout, elle était sympa… Et puis j’aimais ça donc tous les jours je jouais du piano classique, et puis après j’ai fait un peu de piano jazz, parce que j’voulais improviser, comprendre les harmonies, tout ça, et donc j’me suis rapidement mis à écrire des chansons. C’est ce qui m’intéressait et j’écrivais des textes… Les premiers trucs que j’ai faits en fait c’est des textes, avant d’écrire des musiques. Quand j’étais pitit j’écrivais beaucoup de pouésie. Avec des pitites fleurs que je faisais pour ma maman, pour sa fête des mères… et voilà, et donc ensuite j’ai écrit des chansons, j’ai jamais pensé que je pourrais en vivre, dans un premier temps.

Ignatus Himself

Et tu pensais faire quoi alors ?
Je savais pas trop, c’était un peu le problème d’ailleurs, j’ai jamais su trop quoi faire comme boulot. J’ai fait des études, quand même, pour rassurer mes parents, et puis pour bouffer… Une école de commerce, ce genre de trucs qu’on fait quand on sait pas trop quoi faire, quoi. J’ai fait la fac d’éco, j’ai été là-dedans parce que dans mon esprit, être musicien c’était jouer pour d’autres. Je me voyais que pianiste accompagnateur d’autres chanteurs, ce qui m’intéresse absolument pas, moi ce qui m’intéressait c’était d’écrire des chansons, donc je préférais faire un boulot à côté, même un peu chiant, mais garder le plaisir de la musique, pour moi. J’ai eu une période où j’ai bossé régulièrement, et je faisais de la musique le soir, le week-end. C’est une période pendant laquelle j’ai rencontré Olivier, avec qui on a créé les Objets et puis quand même, ce qu’on faisait ensemble on trouvait ça bien, mais on pensait que pour réussir, il fallait être pistonné, avoir des belles gambettes, ou autre chose, quoi… Mais lui comme ses études avaient vraiment foiré il avait que ça comme possibilité donc il a dit, " bon, on va quand même essayer ", et on a envoyé des cassettes, de nos maquettes, et ça a marché très rapidement. Très vite, on a eu des retours… Donc là, vivre de sa musique devenait un truc possible… et à partir de là tout s’est enclenché et moi j’ai petit à petit arrêté d’bosser pour ne plus faire que de la musique.

Et tous les textes étaient de toi dans les Objets ?
La plupart étaient de moi, et la plupart des musiques d’Olivier.

Pourquoi Ignatus ?
Alors Ignatus, ça vient de Ignatius Rei, qui est le héros d’un bouquin qui s’appelle La conjuration des imbéciles de John Kennedy Tool. C’est un bouquin écrit dans les années 60 par un type qui s’est suicidé peu de temps après parce que ça avait pas marché, et ça a marché après sa mort. Sa mère a ressorti le bouquin, a redémarché avec, et là ça a marché. C’est la légende qui dit ça, il paraît que c’est pas vrai, mais bon, j’ai jamais pu vérifier…
Et c’est un bouquin génial, vraiment. Je voulais un nom qui ressemble à rien, j’voulais pas un nom typiquement pop. Ce qui me plaît dans Ignatus c’est qu’on sait pas du tout si ça va être de la techno, de la chanson, c’est indéfinissable, à priori. Et ça me plaisait bien, donc, et puis y’a cette petite référence à un bouquin que j’adore.

Tu voulais pas t’appeler Jérôme Rousseaux ?
J’ai vachement hésite, mais mon nom je le porte toute la journée, j’avais envie d’un peu d’exotisme, d’autre chose… Et puis Rousseaux c’est assez banal comme nom. Non, j’voulais quelque chose d’autre parce que chuis un peu quelqu’un d’autre, notamment quand je suis sur scène. Symboliquement, c’est bien.

Pourquoi c’est terminé, les Objets ?
Alors les Objets c’est terminé parce que Olivier a voulu arrêter. Moi je pensais qu’on pouvait continuer les Objets tout en ayant des projets personnels… Au départ mes idées avec les samples, tout ça, c’était un truc que je faisais un peu pour m’amuser, pour moi, lui avait un autre projet de son côté et il pensait pas que c’était possible de tout faire ensemble, donc il a préféré arrêter le groupe. C’était vachement compromis, les Objets, parce que lui était obligé d’adapter ses musiques à ma voix, moi j’aimais beaucoup ses musiques mais y’avait pas tout ce que j’aimais, je voulais aller sur d’autres terrains aussi. J’pense qu’on aurait pu faire quand même un troisième album, m’enfin j’ai pas trop de regrets… C’est dommage qu’on soit pas allé au bout de ce qu’on pouvait faire, le deuxième album on s’est beaucoup donné dedans mais ça a pas très bien marché, donc c’était un petit peu dur après ça…

Et il fait quoi Olivier maintenant ?
Hében Olivier il est musicien pour d’autres, il joue de la basse pour katerine (le chanteur) et sinon il a un projet de comédie musicale avec plusieurs chanteurs, plusieurs chanteuses, mais il a un petit peu de mal je crois…

Qu’est-ce qui a deux pattes et qui saigne beaucoup ?
Heu… un homme blessé ?

Non, un demi-chien.
[rire discret]

Ahem. Tes influences ?
Elles sont très très variées, les influences. Y’a bien sûr les influences pop, et rock, disons, c’est quand même ce qui m’a marqué le plus dans mon éducation musicale… Mais aussi, j’ai écouté beaucoup de musique classique, de musique du monde, on va dire… indienne, brésilienne… Du Jazz…
En classique j’aime beaucoup les contemporains, comme Ravel, Debussy, Bartok ou Dvorak, en Jazz c’est plutôt Miles Davis, Coltrane. Et puis sinon en rock-pop, chanson, c’est difficile de citer tout le monde. Mais sinon en pop ou en rock, c’est vachement large, que ça soit des groupes typiquement pop comme les Kings, ou des trucs plus rock, j’ai pas une influence forte. J’ai beaucoup d’influences dans un tas de domaines, dans la techno, aussi… tout ce qui est musique électronique, mais c’est vraiment très varié.

Dans les trucs récents ?
Y’a eu… le mec de Talk Talk, là… Marc Ollis, qui a fait un album solo absolument extraordinaire, très calme, super beau… C’est très lent, très aéré, un peu ambiante. Tortoise, Massive Attack, sinon…

C’est quoi le disque le plus honteux de ta collection ?
Heuuu… des disques de jeunesse, quoi. Ou alors des disques qu’on te file dans les maisons de disques et que t’arrives pas à revendre [rires]. J’en ai pas mal, hein, des honteux. J’ai une superbe compil’ Julio Iglesias, là, double CD, mais y’a des trucs… géniaux. Je l’avais prise quand j’étais chez Columbia, en me demandant à qui j’allais bien pouvoir refiler ça, et puis après j’me suis rendu compte que c’était les versions espagnoles en plus. Finalement je l’ai gardée, je l’ai réécoutée y’a quelques mois, et j’étais mort de rire, y’a des trucs extraordinaires. Mais pour les fêtes c’est bien, quoi. Les trucs honteux faut pas trop les virer parce que dix ans plus tard, pour les fêtes ça peut avoir un certain cachet.

Alors en tout, de quels instruments joues-tu ?
Alors au départ je joue du piano, et puis je me suis mis au chant et à la guitare, et aujourd’hui les instruments dont je joue régulièrement c’est guitare, piano, et accordéon.

Mais y’a pas d’accordéon dans l’album…?
Non, j’en ai pas mis dans l’album, j’ai composé quelques titres à l’accordéon, mais ça faisait un peu trop chanson française, je les ai pas gardés. C’est plutôt un truc de fête, ça aussi, j’aime bien jouer de temps en temps quelques trucs de Barbara ou d’Edith Piaf. Mais j’vais essayer, j’aimerais bien en mettre sur le prochain album, mais d’une façon un peu détournée…

Déjà un nouvel album alors ?
Ouais, ouais, je suis en train d’écrire de nouvelles chansons, j’aimerais avoir plus de temps pour le faire… Je pensais en avancer pas mal cet été mais j’y arrive pas parce que je manque de temps donc il faudra que je m’arrête un moment de faire des trucs à côté. J’voudrais écrire beaucoup de chansons… Pour écrire un bon album, il faut du choix, donc il faut plein de chansons pour se donner l’autorisation de virer ce qui est moins bien. Donc j’ai commencé, mais de tout ce que j’ai écrit pour l’instant y’en a qu’une qui me plaît, donc il va falloir que j’en écrive beaucoup, j’ai l’impression…

C’est à cause de ton label Ignatub que t’avais pas assez de temps ?
Ouais, c’était un peu le problème, quand j’ai lancé l’album je faisais que ça, quoi. C’est pour ça que là j’ai signé en licence, comme ça j’ai plus à m’occuper de la promo ou du marketing, et je peux ne me consacrer qu’à l’enregistrement et aux chansons.

Qui sont les musiciens qui ont travaillé avec toi sur l’album ?
L’album a surtout été fait à deux, avec Matthieu Ballet, qui lui a l’avantage de bien maîtriser la technique, donc on s’est mis dans un petit studio et lui était derrière la console. Lui c’est l’ancien clavier de Oui Oui, il avait réalisé juste avant mon album celui d’une chanteuse qui s’appelle Arielle, pour qui j’ai écrit des chansons, et qui chante sur Des Choses.
Et donc on est partis comme ça tous les deux un peu à l’aventure, moi c’était mon premier album solo, c’est la première fois que j’étais aux commandes d’un album, lui c’était la première fois qu’il se retrouvait tout seul derrière une console parce que avec Arielle y’avait quand même un ingénieur du son, et puis on s’est lancés là dedans et on a pas mal appris en faisant.
C’était vraiment un ping-pong permanent, en se donnant des idées, en se surveillant, en se critiquant, en avançant comme ça. Sinon y’a eu pas mal d’interventions… Arielle, justement, qu’a chanté et écrit un texte, Aveugle Eclairé… C’est une chanteuse que j’aime beaucoup, pour qui j’écris des musiques, on collabore beaucoup. Là elle est en train d’enregistrer un nouvel album… C’est vraiment quelqu’un qui a une très forte personnalité, quoi, c’est surtout ça qui m’intéresse dans la musique. A côté de ça y’a eu plusieurs personnes qui sont venues jouer des bouts de musique, par exemple Yan Péchin, un excellent guitariste et en plus quelqu’un de très sympathique. C’est le guitariste de Marie-France, une chanteuse assez étonnante, qui a fait un album vraiment très bien récemment. Y’a eu Alain Ekpob, c’est le bassiste de Vanot, qui a fait 2, 3, titres… Un autre bassiste, Philippe Bataille, qui est le propriétaire du studio où j’ai enregistré… Y’a aussi quelqu’un qui a eu un rôle un peu particulier, c’est Mirwais, qui a mixé quelques titres, et c’est l’ancien guitariste de Taxi Girl, qui lui aussi a fait entre temps un autre projet, Juliette et les indépendants, avec sa femme, et là il a aussi un projet perso de musique électronique.
Et puis y’a eu d’autres copains qui sont passés qu’ont fait un coup de piano… Y’a Mélanie, qui est la journaliste et animatrice de Ketchup & Marmelade et qui intervient régulièrement sur Ouï FM.

Comment tu l’as connue ?
Ben je l’ai connue sur Ouï FM. Au départ elle faisait des lives au Shéhérazade, avec des groupes français, tous les vendredis, et elle me l’avait proposé à l’époque. On s’est plutôt bien entendus et donc comme moi j’écris pas mal, enfin j’écrivais parce que en ce moment moins, mais j’avais fait pas mal de textes que je récitais sur scène avec les Objets, à l’époque, et donc pendant un an j’avais une petite chronique sur Ouï FM toutes les semaines qui s’appelait La Minute de M. Ignatus et qu’elle mettait un peu en musique, ce qui fait qu’on est assez amis… et comme j’avais besoin d’une voix féminine d’un style un peu différent du style d’Arielle, j’ai demandé à Mélanie de faire ça.

Quel est ton film préféré ?
Ben c’est comme au niveau musical, j’ai pas vraiment un film préféré… D’abord je suis pas trop trop cinoche, plutôt musique, littérature, le cinoche j’y vais pas tellement. Si y’a un film qui m’a marqué, heu… je dirais que les cinéastes qui m’ont marqué c’est Fellini, Orson Welles, Tati… Mais j’ai même pas vu un Tarantino je crois. Chuis complètement à la masse… Le cinéma ça m’intéresse très peu, j’me fais chier au cinoche…
C'est lui qui cause.

Tu composes tes chansons en faisant la vaisselle ?
Là tu fais référence à une minute de M. Ignatus qui s’appelle La Vaisselle, c’est ça ? Ouais, mais c’est vrai, l’avantage de la vaisselle, c’est comme de faire la cuisine, c’est des bons moments pour écouter de la musique, on est disponibles. Donc comme j’écoute généralement de la musique en faisant la vaisselle, j’ai pas d’idées de musiques puisque je subis celle des autres. J’en profite pour écouter celle des autres. L’écriture c’est vraiment devant un instrument, les mélodies me viennent pas comme ça. Des fois les idées de texte, ouais… mais souvent c’est vraiment une recherche d’ambiance à partir d’un instrument, plus ou moins une mélodie qui débarque, et un début de texte. Mais tout ça venant un p’tit peu, en le voulant, et ça tombe pas du ciel. Faut aller le chercher un p’tit peu, quand même. Et puis après il faut creuser, creuser…

Avec Matthieu Ballet, tu écris les chansons ?
Non non, Matthieu, il intervient au niveau de la réalisation. Tout ce qui est écriture de chansons je fais ça tout seul.

T’as des complexes ? (rapport à Mes Handicaps)
Heuuu… Ouais, le fait par exemple d’avoir un énorme sexe, c’est quelque chose que bon, on m’le jalouse mais en fin de compte c’est assez embêtant. C’est très gênant des fois, ouais.
Sinon bah les lunettes, quand t’es gosse, c’est vachement chiant. Dès qu’tu veux jouer au foot et que tu fais une tête, tu casses tes lunettes, après t’as peur… en plus moi chuis myope comme une taupe. Non des complexes j’en ai beaucoup eu étant ado, maintenant ça va mieux quand même, heureusement… Mais c’est une bonne chose parce que… j’plaisais pas aux filles, ça me donnait des complexes, et c’est ça qui m’a donné goût à l’écriture… j’étais tout seul dans ma chambre et j’avais envie d’exprimer mon apitoiement sur moi-même.

Et c’est quoi ta première chanson ?
Ca m’a un peu marqué, cette histoire parce que c’était une chanson que j’avais composée à la guitare sur 3 accords qui s’appelait le petit homme est mort et je devais avoir 14, 15 ans, et j’étais sur mon lit, super fier d’avoir fait une chanson, et mon frère a perdu un ami de son âge ce jour là. Quand il est rentré à la maison, il était vachement traumatisé, il venait de perdre un copain de sa classe, ils jouaient au foot, le ballon est passé par dessus le mur, ils sont allés sur la voie ferrée, et le mec s’est fait écraser par le train. Et en rentrant à la maison il me dit ça et moi j’lui dis " mais c’est incroyable, j’ai écrit aujourd’hui une chanson qui s’appelle le petit homme est mort ", et il m’a insulté, et tout. Et j’me suis senti responsable de la mort de ce pauvre gars, c’était assez incroyable…

Et t’en as fait quelque chose de cette chanson ?
Non pas du tout, c’était une chanson sans aucun intérêt, d’un point de vue musical ou autre, c’était ma première et y’avait 3 accords qui suivaient en boucle, trois phrases… mais quand tu composes une chanson pour la première fois c’est exceptionnel, je m’en souviens surtout à cause de ça.
Mais ça m’a un peu refroidi quand même… [rires]

Ca t’a quand même pas dégoûté de la musique apparemment…
Non mais sur le coup, j’dis " merde, si à chaque fois que j’écris un truc… " Ca te fait peur, tu te dis que t’as peut être un genre de pouvoir magique ! En plus comme j’écris pas mal de chansons tristes…

Est-ce que tu te considères comme un artiste engagé ?
Ah, je suis pas un artiste engagé dans le sens politique. Heuu… J’me sens comme un chanteur à textes, parce que j’ai envie de dire des choses…

T’as hésité à dire " j"me sens comme un artiste ", non ? [rires]
Ouais, le mot artiste me gêne un peu des fois… C’est un mot, heu… Bon, Van Gogh était un artiste, Ravel était un artiste… Chuis un chanteur, quoi. Ca me gène de me baptiser moi-même artiste, c’est un peu prétentieux je trouve.

Qu’est-ce que tu préfères ? Les chiens, les merguez, le pepsi, le coca ou les chats ?
Les merguez, loin devant. Les chiens et les chats c’est le contraire des enfants : j’aime bien les chiens et les chats des autres… Parce que c’est vachement bien, j’adore les animaux, mais quand tu veux partir en week-end, ou partir en vacances, les faire pisser, les faire chier, les faire bouffer, c’est vraiment trop chiant.

Mais les chats ils font tout seul…
Ouais mais ça pue… J’ai gardé le chat de Matthieu une fois, ça puait, il est venu me réveiller la nuit en me léchant les couilles, dans le lit… Véridique, c’était un réveil dont je me souviendrai… Non non, j’aime bien les animaux mais y faut une maison, alors que les merguez on peut en bouffer à la campagne ou chez soi, en sandwich…

Et le coca et le pepsi ?
J’en bois de temps en temps, mais très peu, j’évite pour raisons politiques.

Hében t’es engagé un minimum quand même !
Bah, dès qu’une marque fait trop de publicité je l’évite… et je préfères payer plus cher un artisan pour la bouffe, par exemple, plutôt qu’acheter des produits trop industrialisés…
La politique c’est aussi au quotidien : essayer de pas gaspiller l’électricité parce que c’est du nucléaire, de respecter un peu les autres… Je dis pas que je le fais bien, mais j’essaye un peu, quoi. Mais dans les chansons j’ai surtout envie de dénoncer des choses, sans sortir de gros slogan, sans être chiant dans l’aspect slogan, mais plutôt en pointant des choses qui vont mal, quoi.
Comme dans Faits Divers, comme dans le blues de l’homme unidimensionnel

On a l’impression que tu parles beaucoup des vies chiantes où il se passe rien…
Ben ouais parce que je trouve qu’il y a beaucoup de gens qui se laissent complètement mener par le bout du nez, quoi. Ils vont au Mac Do’, ils boivent du Coca, parce que c’est ça qu’on voit partout… Ils écoutent ce qui passe à la télé, etc… Ils suivent, quoi. Ils se font exploiter dans leur vie de consommateurs, et moi je trouve ça un peu con, et c’est quelque chose que j’ai envie de dénoncer.

D’où l’utilité de faire La Minute de M. Ignatus ?
Ben La Minute de M. Ignatus c’était un peu ça, j’aime bien mettre le doigt sur nos contradictions, et quand je dis " nos " c’est les miennes aussi. Nos petits errements, nos petites faiblesses, celles de M. Tout le Monde mais aussi les miennes, quoi. Ca peut faire rire mais y peut y avoir aussi quelque chose de plus grave derrière… Le blues de l’homme unidimensionnel c’est une chanson qui peut faire rire, mais y’a aussi une p’tite gravité derrière, c’est des choses qui arrivent aussi, des mecs qui tirent dans le tas… Et y’a une raison à ça aussi. On nous construit des villes où on est forcés de péter les plombs à un moment ou à un autre…

Qu’est-ce que tu penses de la scène française ?
La scène française est intéressante… [rires] Moi je trouve qu’il y a un retour aux textes, un retour à ce que j’appelle l’esprit chanson… Y’a trop eu un complexe anglo-saxon, une recherche de " faire comme les anglais ", pendant longtemps. ET depuis le début des années 90, y’a pas mal de groupes, et surtout de chanteurs, qui ayant assimilé et apprécié la pop, le rock, toute la musique anglo-saxonne, ont réussi à trouver un style personnel, en chantant en français et en ayant pas peur de revendiquer un côté chanson. Alors bien sûr, Dominique A., Miossec, c’est les deux qui ont le mieux marché, mais même d’autres… Louise Attaque, ça marche aussi. On est chez la même maison de disques, d’ailleurs.

Mais pourquoi avoir signé chez Atmosphériques, justement ?
Pour ne plus faire de la promo… J’ai tout fait d’ici, j’ai pris les disques, je les ai mis dans des enveloppes, j’ai foutu les timbres dessus, j’ai écrit les noms, chuis allé les poster, et j’ai fait ça à 100 magazines, à 100 radios, c’est un boulot harassant.

Mais Ignatub existe toujours quand même ?
Ouais, Ignatub reste producteur de la musique d’Ignatus. Le contrat qui me lie à Atmosphériques, c’est pas un contrat d’artiste, je signe pas en tant que chanteur, musicien, artiste [rires], c’est Ignatub en tant que producteur qui signe chez Atmosphériques. C’est un contrat de licence.
Donc moi je reste totalement indépendant en termes de musique, je fais c’que j’veux musicalement, je vais sortir des disques d’autres personnes, et bien sûr Atmosphériques je leur fait écouter mes projets, on en parle entre nous…

Mais ils ont le droit de refuser ?
Je sais pas… Faudra que je voie ça dans le contrat.

Tu pourrais péter dans un micro et ils te le prendraient ?
Ouais, je pense. Ils se donnent le droit de refuser, bien sûr, mais en gros, heu… j’ai une ceraine liberté artistique.

Mais c’est aussi avec Sony, Atmosphériques
Au niveau de la distribution uniquement. Si l’album se plante et que j’en vends que 500, ben tant pis, j’en aurait vendu que 500, mais y’a pas d’engagement à la base d’en vendre un minimum.
Donc eux, leur boulot, c’est de le mettre en place cet album, en tant que distributeurs… de le mettre en magasin, de le mettre dans leur catalogue, et c’est tout.
Moi je suis plutôt content d’être chez Atmosphériques, parce que je suis plus tout seul, j’ai beaucoup fait tout seul, que ce soit au niveau des décisions à prendre, des choix à faire, c’est un peu lourd… Tandis que là y’a des gens à qui je peux parler, déléguer certaines choses et puis des gens qui ont un peu de fric pour m’aider à me faire connaître, à avoir un clip, un peu de pub, que je peux pas me payer moi…

Et quand tu découvres des groupes, ça se passe comment ?
Je leur propose, si ça leur plaît ils prennent, sinon ils prennent pas. Et moi je peux le sortir ailleurs, sur Ignatub, avec une distribution propre et tout ça.
Cette année je fais deux personnes comme ça, avec des 4 titres, y’a Dr. Love mais qui s’appelle plus Dr. Love, il s’appelle M. Chance maintenant. Ca c’est de l’électro… Et une fille qui s’appelle Sophie Meriem-Rockwell, à la fin de l’année. C’est de la chanson française.

Une question difficile : Mais pourquoi, pourquoi toi ?
[rires]
Ben justement je sais pas, c’est un grand point d’interrogation.

Ca va te faire quoi d’être sur le web ?
Ben j’y suis déjà un p’tit peu ! J’ai des potes qui ont fait un site, un système de vente de disques et de chansons individuelles. Et j’ai eu une interview sur un site qui s’appelle le Fennec [Note des Zavattistes : Des concurrents !! Argh !], on avait fait une interview croisée avec le pianiste des recycleurs, un groupe de jazz avec qui j’avais fait une compil’ de reprises de chansons françaises, avec Katerine et deux trois autres personnes… Sacha, la chanteuse d’Héliogabale, et Irène Jacob, l’actrice.

T’as quelque chose à dire au monde qui te tend les bras ? 
Au monde qui me tend les bras ? Chuis pas sûr qu’il me tende les bras, c’est plutôt à moi de lui tendre… Aimons-nous les uns les autres ! [rires]

Ca fait un peu hippie ça !! Ca fait même très chrétien ! [rires]
Ouais ouais, mais tout n’est pas à jeter dans les paroles bibliques et dans les préceptes hippies ! Justement j’viens de faire un morceau avec un citar indien, donc j’était dans une ambiance hippie hier… hippie pip hourra !

Tu l’avais préparée celle-là ?
Non… [rires]

Dernière question : d’où vient ton super humour ?
Mon super humour ? [rires] D’un mélange… de là où j’ai vécu, de mes cultures, de mes racines, de mes voyages… Mes cultures, c’est plutôt bourge, mais j’ai eu la chance de passer toute mon enfance en Seine St Denis, ce qui est pas très bourge, et le mélange des deux m’a ouvert les yeux, parce que le milieu bourgeois est un milieu hyper fermé… J’étais à Pavillon Sous Bois, dans une zone pavillonnaire, et je fréquentais des gens qui étaient pas de mon milieu puisqu’il y avait quasiment personne de mon milieu dans le coin [rires] mais surtout, comme j’étais fainéant j’étais dans une école où y’avait plein de cancres, parce que j’étais mauvais élève, et du coup je me retrouvais avec des gens de cultures très différentes de moi.
Toujours le même.

T’as quel âge au fait ?
38 ans. Je sais, j’les fais pas… [rires]

Ze End


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